La coupure, comment la gérer ?

 

Par Loïc Arbez , www.optimum-training-system.fr 

 

Une fois courue votre dernière compétition de la saison, êtes-vous de ceux qui rangez vos skis et adoptez le régime ‘‘pieds en éventail une bière à la main devant la télé’’ ou bien continuez-vous l’entraînement ?!

 

La plupart des skieurs optent pour la première solution (ou une qui s’en rapproche !) et coupent ainsi totalement leur entraînement en ce mois d’avril. Pour certains, c’est un réel besoin, dû à une fatigue tant physique que mental, pour d’autres, cette démarche relève plutôt du ‘’j’ai entendu que donc je fais pareil’’. Or, en matière d’entraînement, toute rupture brutale doit être évitée et ‘’faire comme’’ n’est pas forcément judicieux…

 

Coupure ou transition ?

 

La période d’entraînement qui sépare deux saisons est généralement appelée ‘’coupure annuelle’’. Cette expression, bien que couramment utilisée, elle ne nous satisfait pas pleinement ! Nous lui préférons celle de ‘’période de transition’’. Les raisons ? Vous allez les comprendre en lisant la suite de ce dossier.

 

La transition : fin ou début d’une saison ?

 

Les skieurs appréhendent généralement la transition entre deux saisons comme la fin de longs mois de préparation (de mai à novembre), ‘‘sanctionnés’’ par l’enchaînement de compétitions (de décembre à mars). Or, ‘’la fin de’’ n’annonce généralement rien de bon  Récupérer en ce mois d’avril est normal compte-tenu des longs mois de préparation et des semaines de compétition. Cette récupération, elle n’est malheureusement pas toujours bien maîtrisée. Or, tout relâchement excessif doit être évité parce que le risque de se blesser quelques semaines après la reprise de l’entraînement est grand. L’organisme n’apprécie pas les brusques changements de rythme, dans un sens (augmentation de la charge d’entraînement) comme dans l’autre (diminution). Et tout relâchement excessif doit être banni car la qualité de la récupération influencera celle de la préparation des premières semaines de reprise.

 

Récupérer pour bien repartir

 

Mars est généralement un mois intense avec la participation aux dernières compétitions de la saison. La fatigue est donc généralement bien présente en ce début avril ! Avant de s’engager dans une nouvelle préparation en prévision de la saison prochaine, il convient logiquement de respecter une brève période de récupération. Son objectif étant la résorption de la fatigue accumulée. Or, cette récupération est négligée par certains, pas seulement parce qu’ils se ‘‘sédentarisent’’ et que leur régime alimentaire est totalement déséquilibré mais aussi parce que certains vont, à l’inverse, avoir tendance à poursuivre un entraînement trop intense. Si la fatigue n’est pas excessive et que la motivation est là, autant en profiter pour s’entraîner, c’est évident. Mais la charge d’entraînement doit malgré tout rester légère, sans contrainte excessive. A l’autre ‘’bout de la corde’’, finir épuisé ces longues semaines de préparation, est-ce normal ? Assurément pas ! Même si se préparer physiquement plusieurs mois durant et enchaîner les compétitions ne sont évidemment pas de tout repos, finir la saison ‘‘sur les rotules’’ et avoir le sentiment d’arriver ‘’en bout de course’’ posent question.

 

10.04.2011, Rovaniemi, Finland (FIN): the winner Jean Marc Gaillard (FRA), Fischer, Swix, Rottefella, One Way - Tour de Barents 2011, Ounasvaara Climb Pursuit, Rovaniemi (FIN). www.nordicfocus.com. © Laiho/NordicFocus. Every downloaded picture is fee-liLa régularité, gage de succès futurs

 

Vos disponibilités pour vous entraîner étant vraisemblablement très limitées, toute perte excessive de vos capacités physiques doit alors être évitée. Si vous régressez trop, vous serez contraint de redoubler d’effort pour retrouver le niveau qui était le vôtre avant ces semaines de relâchement. Or, ces efforts, ils ne vous serviront pas à progresser mais juste à retrouver votre niveau physique d’antan. Et comme se sentir ‘’en petite forme’’ n’est jamais agréable, vous allez probablement redoubler d’efforts pour rapidement revenir à un niveau de condition physique acceptable. Des efforts qui malheureusement pourraient finalement vous coûter cher : à vouloir trop vite revenir en forme, vous risquez les blessures.

 

La période de transition doit donc être correctement gérée : quelques jours de repos tout au plus et plusieurs autres avec une charge d’entraînement relativement faible (en course

à pied, natation, kayak, vélo...). Certains skieurs, à l’inverse, ne s’octroient jamais de récupération. Leur crainte ? Régresser. Cette peur, est-elle justifiée ?

 

La transition : risque de désentraînement ?

 

L’absence totale et prolongée de contraintes conduit inexorablement à la régression des capacités physiques. Ces pertes, elles n’apparaissent pas non plus du jour au lendemain ! Ce ne sont pas deux ou trois jours de repos qui vous feront régresser. Les premiers signes réels de régression n’apparaissent qu’environ au bout d’une semaine d’inactivité. Par contre, dès ce septième jour, le risque de désentraînement augmente et chaque jour supplémentaire de repos total se traduira par de nouvelles pertes de capacité physique. Pour éviter un tel risque, le maintien d’une stimulation minimale (une courte séance, à faible intensité) et régulière (tous les deux jours) est donc indispensable.

 

Et trop s’entraîner alors ?!

 

Si vous ne souhaitez pas être épuisé début juillet, à l’entame d’une période cruciale pour l’entraînement (son volume doit être grand), n’en faites pas trop en avril voire mai, et ce même si vous ne ressentez pas de fatigue et que vous êtes motivé ! Que vous continuiez l’entraînement, d’accord, mais les séances doivent être courtes et réalisées à faible intensité. Comme il est vraisemblable que vous repreniez sérieusement la course à pied ou le vélo en ce mois d’avril, cette reprise progressive tombe donc bien ! Par ailleurs, que vous couriez en compétition (course à pied ou cyclisme) ne pose pas problème mais attendez le mois de juin voire juillet pour prendre part à des longues distances (type trails longs). Là-aussi, la progressivité doit être de mise !

 

Pensez à la suite et...

 

Comme vous vous entraînez peu en ce mois d’avril, profitez-en pour réfléchir à la ‘‘suite des évènements’’. Organiser la prochaine saison, c’est tout d’abord analyser la précédente. Peu de skieurs se donnent véritablement la peine de procéder à cette phase de réflexion. Or, identifier les erreurs de sa préparation et ses aspects positifs donnent de précieuses informations. Un outil prend toute sa place dans ce brainstorming : le carnet d’entraînement. Sur papier ou informatisé, tenez-en un à jour car il permet de récolter de nombreuses informations sur la charge d’entraînement (son volume et son intensité, sa dynamique…) et de ses effets (évolution des niveaux de forme et fatigue, les éventuelles infections ou blessures, etc).

 

S’entraîner aux sensations, sans planification et programmation précises, trouve rapidement ses limites. Si vous n’avez pas de schéma en tête, lorsque vous serez fatigué et que vous douterez de la pertinence de votre entraînement, vous aurez une fâcheuse tendance à vous laissez aller...

Planifier sa saison exige la prise en compte de nombreux éléments, parmi lesquels son ou ses objectifs (une longue distance se prépare différemment d’un courte) et de ses impératifs professionnels et familiaux (un(e) père/mère travaillant 40 h par semaine ne gèrera pas son entraînement de la même façon qu’une personne célibataire, sans enfant, et étant aux 35 heures).

 

Comme une saison s’articule autour d’un ou deux principaux objectifs (être performant quatre mois durant n’est pas possible), définissez-les rapidement. Au-delà de leur utilité dans la planification de votre entraînement, ils donneront du sens à votre préparation et soutiendront votre motivation. Le ‘’je n’ai pas d’objectif, je m’entraîne quand j’en ai envie’’ n’est pas sérieux !

 

En fonction de ces objectifs, déterminez des périodes d’entraînement (générale, orientée, spécifique, pré-compétitive…) et dégagez des cycles de travail (développement/maintien de la puissance maximale aérobie, de la force maximale, etc). Enfin, n’oubliez pas de planifier des évaluations, sous forme de tests chronométrés (montée en ski à roulette) ou de compétitions de référence (10 km en course à pied par exemple). Se tester régulièrement permet de soutenir la motivation et d’éviter de ‘’faire fausse route’’. Ces évaluations permettent en outre de se remettre en cause et évite de ‘‘s’endormir’’ avec une perpétuelle auto-satisfaction !

 

...au bilan médical

 

Profitez de cette période de transition pour réaliser un bilan médical complet (sanguin, postural, dentaire, etc). Vous corrigerez ainsi les éventuels déficits voire carences nutritionnels et les déséquilibres de l’appareil locomoteur. Vous repartirez ainsi dans une nouvelle préparation sur des bases solides.

 

Photo : Nordic Focus