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Anne-Carole Drezet, coach WTS Sport, a rédigé ce dossier pour www.ski-nordique.net  :

 

Les femmes sont souvent considérées comme « le sexe faible » et on peut remarquer que dans certains sports, les femmes sont souvent en minorité par rapport aux hommes.

 

Vient s’ajouter la différence de performances auxquelles elles sont confrontées, qui ne fait que renforcer ce sentiment d’inégalité physique face aux hommes. Oui mais on a des excuses !

 

En effet, le nature ne nous a pas dotées des mêmes caractéristiques que les hommes, et à travers cet article, vous comprendrez que malgré toute la bonne volonté du monde, eh bien oui Messieurs, nous n’arriverons pas à vous surpasser dans certains domaines.

 

En général, sur des épreuves de longue distance, l’écart de performance observé entre les meilleurs hommes et meilleures femmes avoisine les 10%. Pourtant certaines femmes s’entraînent autant voire plus que certains hommes.

 

Comment  expliquer cette différence de performance ?

 

Tout d’abord il existe des facteurs physiologiques qui semblent être à l’origine de cet écart de performance :

 

* La VO2max : consommation maximale d’oxygène

*  Le seuil anaérobie

* Le niveau de force

*  La gestion de l’effort

 

  1.     La consommation maximale d’oxygène : VO2max

 

La VO2 max est considérée comme le meilleur indice de la capacité cardiorespiratoire du sportif. Donc plus la VO2max est élevée, plus on est censé être performant dans les sports d’endurance.

 

On constate en général que la VO2 max des hommes est supérieure à celle des femmes. Les plus grosses VO2max enregistrées lors de tests d’effort, étant chez les skieurs de fond : jusqu’à 90ml d’O2/kg pour les hommes.

 

Si l’on parle en valeur absolue, pour un sportif confirmé, la VO2max pourra approcher les 5 à 6 l d’O2/min, alors qu’une sportive de très bon niveau atteindra les 4l d’O2/min soit une différence de plus de 65%.

 

 Kalla

 

Si l’on calcule cette VO2max en valeur relative, c'est-à-dire par kg de poids de corps, on obtiendra :

           

Pour un homme de 70kg : (6 l /min) / 70= 0,0857 l/kg soit 85,7ml /kg

Pour une femme de 55kg : (3 l/min) / 50= 0,06 : /kg soit 60 ml /kg

 

La différence se réduit aux alentours de 30%, puisqu’en général, les hommes sont plus lourds que les femmes. La différence n’est pourtant pas éliminée.

 

Si l’on s’intéresse cette fois au pourcentage de masse grasse, il faut savoir que les hommes ont un pourcentage plus faible de masse grasse que les femmes. Les femmes très entraînées peuvent descendre jusqu’à 15% mais en général elles se situent entre 15 et 20% (pour des sportives).

 

Les hommes quant à eux, ont un pourcentage situé entre 5 et 10%. Donc si on évalue la VO2max en fonction du pourcentage de masse maigre (poids total – poids de masse grasse), la différence s’amenuise entre 10 à 15% si on tient compte de la différence de composition corporelle.

 

D’où viennent ces 10% restant ? L’explication peut venir du système de transport de l’oxygène dans le sang, qui est un facteur limitant de la VO2max.

 

L’oxygène est véhiculé dans le sang grâce à l’hémoglobine, molécule fixée sur les globules rouges. Or les femmes ont un taux d’hémoglobine plus faible que les hommes, ainsi pour un volume de sang donné le muscle reçoit moins d’oxygène.

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Puis, le Volume d’Ejection Systolique, qui correspond au volume de sang éjecté à chaque battement du cœur, est plus faible chez la femme en raison :

 

* Des dimensions cardiaques plus petites

* Un volume sanguin total plus faible

 

Pour un même exercice, le débit cardiaque est à peu près  le même chez l’homme et la femme. Comme le Volume d’éjection est plus faible chez la femme, la fréquence cardiaque est plus haute car :

 

Débit Cardiaque (Qc)= VES*Fréquence cardiaque

 

Enfin, il existe une dernière différence, qui dépend largement des dimensions coroporelles : la ventilation. Une femme étant généralement plus « petite » ( donc cage thoracique plus petite) qu’un homme, sa ventilation est donc inférieure à l’exercice maximal. 

 

Pour résumer :

 

Les femmes ont une VO2max plus faible que les hommes en raison de :

* Un pourcentage de masse grasse plus important

* Un contenu sanguin en hémoglobine inférieur

* Un volume d’éjection plus faible en raison de dimensions cardiaques plus petites et d’un volume de sang moins important

* Des adaptations respiratoires différentes dues aux dimensions corporelles

 

Bien sûr qu’il y a des femmes meilleures que des hommes, avec des V02max et des performances réalisées supérieures, mais si on se base sur les meilleurs de chaque discipline, les différences sont toujours là, et les meilleures skieuses ne dépasseront jamais les meilleurs skieurs, malgré que ces femmes là surclassent une bonne partie de la population sportive masculine !

 

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2.     Le seuil anaérobie

 

Le seuil anaérobie représente une zone d’intensité à partir de laquelle les lactates s’accumulent dans le sang, c’est une zone de transition entre des efforts longs et des efforts intenses. C’est la zone rouge dans laquelle il devient difficile de poursuivre l’effort au-delà de 30 min.

 

Plus ce seuil est situé à un haut pourcentage de VO2max, plus on est capable de skier à  une forte intensité pendant longtemps.

 

Les femmes ont un seuil identique aux hommes lorsque ce seuil est exprimé en pourcentage de VO2max (en général il se situe aux alentours de 80 à 85 % de la VO2max).

 

Mais pour une puissance donnée, les femmes travaillent à un pourcentage plus important de leur VO2max que les hommes. Donc leur taux de lactates est plus important, leur seuil apparaît donc plus tôt pour un même niveau d’intensité.

 

En résumé, une femme ski à son seuil anaérobie et commence à être dans le dur alors qu’un homme est en endurance sans trop de difficulté, pour une même vitesse (bien sûr tout dépend du niveau d’entraînement).

 

Donc finalement, il n’y a pas de différence au niveau du seuil anaérobie, entre les hommes et les femmes si celui-ci est exprimé en pourcentage de VO2max. Et les femmes, par un entraînement adapté peuvent autant améliorer leur seuil que les hommes.

 

3.     Le niveau de force

 

Voici un sujet sensible : l’homme est plus fort que la femme. Encore Dame nature qui a préféré doter ces Messieurs d’une puissance supérieure à celle des femmes, afin de nous rappeler notre rôle de sexe faible ! Trêve de plaisanterie !

 

Tout d’abord si l’on veut comparer le niveau de force entre les deux sexes, il convient d’utiliser des valeurs relatives et non absolues.

 

En effet en valeur absolue, les hommes sont 30 à 60% plus forts que les femmes. En valeur relative, c'est-à-dire par rapport au poids du corps, cette différence n’est plus que de 5 à 15%, et est encore réduite lorsqu’on l’exprime en pourcentage de masse maigre.

 

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Par contre si on rapporte la force développée à une même masse musculaire, il n’y a aucune différence entre les deux sexes.

 

Et finalement, lorsqu’on demande de maintenir un niveau de force correspondant à 50%de la force max, les femmes tiennent plus longtemps que les hommes !

Ceci témoignerait d’une meilleure résistance à la fatigue chez les femmes.

 

Donc en raison d’une masse musculaire supérieure, et d’une surface de section des fibres musculaires plus grande, les hommes ont donc plus de force et peuvent développer des niveaux de puissance plus importants sur le terrain.

 

4.     La gestion de l’effort

 

Le coût énergétique représente la quantité d’énergie consommée par unité de distance. Plus on est économique, plus on va pouvoir durer à une certaine intensité, ce qui est  un déterminant très important en ski de fond. Plusieurs facteurs autres que physiologiques entrent en jeu, notamment la technique.

 

En effet, un skieur avec une bonne technique gaspillera moins d’énergie, et pourra donc mieux gérer son effort, tout en skiant à une vitesse raisonnable.

 

On serait tenter de penser qu’en raison d’une proportion de masse grasse plus importante, les femmes brûlent plus d’énergie lors de l’effort car elles utiliseraient mieux les réserves lipidiques. Il n’en est rien, on n’observe aucune différence du métabolisme des graisses entre les femmes et les hommes.

 

Il existe encore des divergences sur ce sujet, et mais les études sont peu nombreuses.

 

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 5.     Comment gérer les entraînements

 

Ces différences doivent être prises en compte par les entraîneurs notamment lorsque les entraînements se font en groupe, ce qui est généralement le cas dans les clubs. Et lorsque les filles « traînent »  un peu, les garçons s’impatientent…

 

Si l’on s’entraîne en couple ou en groupe, il est important de tenir compte des niveaux et des spécificités de chacun.

 

En effet, tout dépend de l’objectif. Si la sortie a un but loisir et détente, aucun problème, mais attention messieurs de ne pas toujours vous plaindre et râler après votre compagne qui n’avance pas assez vite, qui a plus de difficulté dans les passages techniques demandant plus de force, et qui se fatigue plus vite que vous car obligée de suivre le rythme imposé !

 

Soyez indulgents car maintenant vous êtes au courant que la nature vous a dotés de certains avantages.

 

Si la séance a un but d’entraînement, il faudra prendre en compte ces différences, car une séance d’endurance pour Monsieur peut devenir une séance au seuil et difficile pour Madame. Donc pourquoi ne pas partir avec des objectifs différents ? Pourquoi ne pas revenir en arrière chercher votre partenaire lors d’une montée difficile et ainsi travailler en fractionné ?

 

En club (cela demande un peu d’organisation)  l’idéal serait de différencier les groupes, avec des objectifs et allures spécifiques. Les filles qui s’entraînent toujours avec des garçons risque d’être souvent en surrégime, mais s’accrochent au groupe pour ne pas se faire attendre…

 

A force d’entraînements inadaptés, elles risquent le surentraînement,  ceci d’autant plus que les filles sportives ont un fort mental, et ont parfois du mal à s’écouter et résistent malgré la fatigue.

Il est indispensable pour l’entraîneur de repérer ces situations, car la motivation risque de disparaître, et le surentraînement de s’installer.

 

Bien sûr il est parfois nécessaire de s’entraîner seul(e), si on veut pouvoir réaliser sa séance dans les bonnes zones de travail. Ceci est indispensable si on cherche la progression, en faisant des séances spécifiques avec ses propres repères (vitesse, Fc, sensations…)

 

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Conclusion :

 

Il existe des différences physiologiques qui expliquent cet écart de performance entre les hommes et les femmes, bien qu’il existe des femmes bien plus performantes que la plupart des hommes.

 

Cela n’empêche en rien aux femmes d’améliorer considérablement leurs performances par un entraînement individualisé, adapté et personnalisé, spécifique à leurs objectifs. Ceci est indispensable pour progresser régulièrement, et gérer au mieux les épisodes de fatigue.

 

Il faut toujours tenir compte de ces différences lors des entraînements sans quoi la personne la plus faible qui a tendance à être un cran au dessus pour suivre le rythme, risque le surentraînement et une perte de motivation pour la discipline.

 

Est-ce qu’un jour les femmes seront plus performantes que les hommes à même niveau ?

La réponse étant quand elles auront une meilleure VO2max que les hommes, pour ainsi dire…ce ne sera jamais possible.

 

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Références 

 

WILMORE, COSTILL. Physiologie du sport et de l’exercice physique. Bruxelles, DeBoeck University, Coll.Sciences et pratiques du sport, 1998.

 

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Photos : copyright Nordic Focus

 

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