Arnaud Boisset a tout connu en quelques mois

L’histoire du Suisse Arnaud Boisset illustre à quel point, dans le ski de compétition, la frontière entre la joie la plus intense et le désespoir absolu peut être d’une minceur vertigineuse.

Le 22 mars 2024, tout sourire, le spécialiste de vitesse vit le sommet de sa carrière et décroche son premier podium en Coupe du monde, une troisième place lors du super-G de Saalbach.

Neuf mois plus tard, c’est la catastrophe : le skieur de 27 ans gît inconscient sur la piste de Beaver Creek, aux États-Unis, après un saut manqué au-dessus du fameux « Harrier ».

À l’hôpital de Vail, le verdict tombe : grave commotion cérébrale et douloureuses contusions à l’épaule et au visage.

Miracle : six semaines plus tard, Arnaud Boisset réussit à marquer des points à nouveau, terminant 28e du super-G du Lauberhorn.

Mais huit jours après, rebelote : il chute encore, cette fois lors de la mythique descente du Hahnenkamm à Kitzbühel. Heureusement, il s’en sort sans blessure majeure.

Mais une nouvelle chute survenue trois semaines après, lors d’un entraînement à Crans-Montana, est synonyme de fin de saison.

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L’aide d’un coach mental

Diplômé en économie, Arnaud Boisset comprend vite qu’il a besoin d’aide pour surmonter ces chocs à répétition. Pendant la préparation de cet hiver olympique, il se tourne vers un soutien psychologique.

« J’ai trouvé un très bon spécialiste à Lausanne, un psychologue. Mais il ne veut pas que je l’appelle ainsi. Il se considère plutôt comme mon coach », explique Boisset.

Les progrès sont flagrants lors du camp d’entraînement de descente au Chili en septembre. Mais là, le destin frappe encore : l’accident mortel de l’Italien Matteo Franzoso ravive brutalement les blessures mentales du Valaisan.

« Comme Matteo n’avait qu’un an de moins que moi, nous nous croisions souvent en Coupe d’Europe. C’était vraiment un bon gars. Là où d’autres Italiens restaient entre eux, lui aimait discuter avec tout le monde », raconte-t-il à Blick.

Arnaud Boisset en course

Le doute après le drame

Le 15 septembre, au Chili, Arnaud Boisset apprend la nouvelle en checkant son téléphone entre deux exercices. « Je me suis alors demandé sérieusement si je voulais continuer à risquer ma vie presque tous les jours », confie-t-il, bouleversé.

Le lendemain, il discute longuement avec son technicien de ski, David Bouchardi, lui aussi marqué par le drame.

« David était l’homme de service de David Poisson, le Français décédé en 2017 lors d’un entraînement à Nakiska. Forcément, la mort de Franzoso a ravivé ces souvenirs douloureux. »

Grâce à une séance d’hypnose à distance avec son coach, Boisset retrouve un peu de sérénité. « Après la séance, je me suis senti beaucoup mieux », avoue-t-il.

Mais le 1er octobre, à Zurich, visionner le film Downhill Skiers avec ses coéquipiers le replonge dans l’angoisse.

« On y voit beaucoup de chutes spectaculaires… Cela m’a violemment ramené à mes propres souvenirs. Je suis rentré chez moi ce soir-là avec un mauvais pressentiment. »

Depuis, de nouvelles séances d’hypnose l’ont aidé à évacuer ces émotions. « Mon coach parvient toujours à faire disparaître tout ce qu’il y a de négatif dans ma tête », sourit-il aujourd’hui.

Arnaud Boisset va désormais tout tenter pour revenir à son meilleur niveau, mais le chemin, surtout mental, s’annonce long et difficile.