Il y a encore quelques années, on parlait d’eux comme des joyaux des Alpes. Aujourd’hui, les mots qui reviennent sont « pertes », « perquisitions » et « survie ».
Fischer, Atomic, Blizzard : les trois grandes marques historiques du ski autrichien viennent de publier des bilans qui font mal à lire.
Et pendant que les enquêteurs de la Commission européenne fouillent leurs bureaux à la recherche de preuves d’entente sur les prix, les comptables, eux, comptent les millions qui s’envolent.
Chez Fischer, l’entreprise familiale de Ried im Innkreis, le choc est brutal. L’an dernier, elle affichait un bénéfice de 1,4 million d’euros. Cette année : 10,5 millions de perte et le chiffre d’affaires a fondue de plus de 30 millions d’euros.
« On a des entrepôts pleins et des magasins qui n’ont pas déstocké », explique sobrement un cadre de la maison.
Un hiver trop doux, des clients qui serrent la vis, des commandes annulées : le cocktail a été fatal.
Atomic, la marque rouge et noire rachetée par le groupe finno-chinois Amer Sports, n’est pas épargnée. Exit le bénéfice de 2,5 millions d’euros et bonjour la perte de 3,65 millions.
Même sentence chez Blizzard, l’ex-fierté du Vorarlberg : 1,6 million d’euros de pertes là où il y avait encore 700 000 euros de profit l’année précédente.
« On vit une tempête parfaite », résume un dirigeant sous couvert d’anonymat. D’un côté, les conséquences d’un hiver pourri qui a laissé les stations vides et les magasins bondés de skis invendus.
De l’autre, cette enquête antitrust européenne qui plane comme une épée de Damoclès : en cas de condamnation, les amendes pourraient atteindre 10% du chiffre d’affaires mondial, des dizaines de millions d’euros qui mettraient n’importe laquelle de ces entreprises à genoux.
Dans les usines, l’ambiance est lourde
À Altenmarkt, à Wagrain ou à Mittersill, on fabrique toujours les meilleurs skis du monde, mais les carnets de commandes ne se remplissent plus comme avant. Certains salariés regardent déjà les petites annonces.
« On a grandi avec la certitude que le ski, c’était l’Autriche. Voir ça, ça fait mal au cœur », confie une employée de Fischer qui préfère rester anonyme.
Pourtant, personne n’a encore baissé les bras.
Chez Fischer, on parle de « mesures d’urgence » et de diversification (skis de randonnée, produits carbone neutre). Atomic mise sur les JO 2026 de Milan-Cortina pour relancer la machine.
Quant à Blizzard, on serre les dents en attendant que l’hiver revienne… et que les enquêteurs partent. Mais une chose est sûre : cet hiver, les géants autrichiens du ski ne glissent plus sur la neige. Ils marchent sur la glace. Très fine.
