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Une histoire touchante et terrible

Comme beaucoup d'autres skieuses Tricolores avant elle, Esther Paslier a choisi de mettre un terme immédiat à sa carrière, à seulement 25 ans. Victorieuse 1 fois en coupe d'Europe, trois podiums, elle compte également 29 départs en coupe du monde.

Membre de l'équipe de France depuis ses années juniors, elle a ensuite perdu la confiance de la FFS l'obligeant à travailler en dehors du cadre fédéral avant de revenir cet hiver.

Pour expliquer son choix, sa volonté et surtout son besoin de voir désormais autre chose, Esther Paslier a publier un long texte, intéressant et rare à la fois, sur sa page Instagram, où elle évoque de gros soucis qui vont aboutir à une dépression.

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"La décision a mûri doucement depuis quelques mois et elle arrive désormais à son terme. Une page qui se tourne, le cœur en paix et avec la certitude d’avoir bouclé la boucle.

Parmi les différents athlètes et les différents systèmes qui sont là pour les accompagner, il n’en existe pas, pour l’un comme pour l’autre, de foncièrement « mauvais ». Certains duos athlète/système arrivent à se comprendre et à tirer le meilleur de chacun. D’autres peinent à fonctionner ensemble et s’usent.

Certains dysfonctionnements sont évidents et faciles à expliquer, d’autres sont moins palpables. Ils sont le fruit de petites choses du quotidien qui comptent au fil des mois : gestes, regards, mots, encouragements… qui laissent comprendre que l’on est digne d’intérêt ou pas.

Ils proviennent de points de vue divergents, de difficulté d’acceptation/compréhension de l’autre, de confiance mal accordée, d’engagements manqués, d’accompagnement artificiel, etc. De liens humains en somme, d’alchimie ; ou plutôt de non-alchimie.

Cette non-alchimie, je l’ai vécue et sentie pendant plusieurs années. Alors on parle un peu, on dérange, et surtout on essaye de s’adapter. On dissimule ce qui froisse et on avance. Skier vite, c’est ce qui compte.

Ça m’a usé durant de longs mois pour aboutir à un trop plein, une dépression. Prendre un traitement à 22 ans, ça a été difficile à admettre.

Difficile pour soi et pour l’entourage quand tu fais finalement quelque chose de certes exigeant, mais quelque chose que tu aimes. Le duo est blessé et les relations de plus en plus dégradées.

Je l’ai accepté, au même titre que les autres difficultés que j’ai eu à surmonter. C’était comme ça. Mon éviction des groupes fédéraux a fait que j’ai eu l’opportunité d’expérimenter le ski de haut niveau dans d’autres cadres, avec un (des) autre(s) type d’accompagnement(s). C’était la saison dernière.

Cette année m’a permis de me relever des mois difficiles. Elle m’a redonné confiance en moi et m’a fait grandir, bien au-delà de ce que j’aurais pu imaginer.

J’ai su faire beaucoup, avec peu de moyens mais avec une énergie débordante née de cette expérimentation et des différentes rencontres dans lesquelles, nombreuses de ces belles choses qui vous poussent à avancer, à se dépasser, ont refait surface.

J’avais oublié comme c’était bien le ski de compétition ! Comme ça pouvait être « simple » tout en étant si complexe ! Et comme une évidence, les résultats espérés ont suivi. Cette année m’a finalement redonné l’équilibre, l’épanouissement personnel que j’avais perdu et l’Amour du ski qui l’accompagne.

A la suite des bons résultats de l'hiver dernier, la voie fédérale s’est ré-ouverte à moi, alors j’y suis retournée.

J’y suis retournée « réparée », avec un regard enrichi, une expérience plus forte et l’espoir que cette fois, l’alchimie fonctionne. J’ai essayé durement de tout faire pour la créer, la trouver. Je me suis investie pleinement, dans ma pratique sportive bien sûr et dans les relations humaines en particulier.

De nouveaux liens positifs et constructifs se sont tissés. Malgré tout, de nombreux dysfonctionnements restent encore. La passion pour ce sport est toujours présente, j’aime la vie d’athlète, j’aime m’entraîner et j’aime me dépasser.

Mais ça n’a pas suffit. Je suis désormais convaincue que je ne trouve pas, dans ce cadre, ce qui permet de skier avec le cœur, au maximum de mes capacités. Ce qui permet d’avancer sereinement et de se projeter.

Mon corps se vide de son énergie et la flamme peine à rester allumée. Je décide donc de terminer mon parcours de skieuse ici.

J’ai eu cette chance, l’an dernier, d’avoir vécu le ski de haut niveau sous une autre dimension. J’aurais souhaité avoir toutes les ressources nécessaires pour m’engager de façon pérenne dans ces voies alternatives.

J’encourage tous les athlètes qui choisissent d’expérimenter d’autres voies, de voir large, de ne pas avoir peur d’essayer. J’encourage la variété des systèmes permettant la pratique du ski de haut niveau.

La diversité des systèmes permettra, à coup sûr, de trouver les meilleurs duos. J’ai désormais à cœur d’aller dans une direction dans laquelle je retrouve de nouveau cette énergie débordante, cette inspiration. Une direction dans laquelle je continuerai de grandir.

Mais quelle aventure ça a été depuis le tout début dans le Massif Central!!! Alors je remercie du fond du cœur tout ceux qui m’ont accompagnée sur ce chemin. Tout a compté. MILLE MERCIS "