À moins de trois mois du coup d'envoi des JO, les sites d'accueil sont en ébullition, à l'image du village olympique de Milan.
Conçu par le cabinet américain Skidmore, Owings & Merrill et présenté en 2021, ce village ambitionne de s'intégrer harmonieusement au nouveau visage du quartier Scalo Romana, en pleine métamorphose.
Le projet, évalué à 330 millions d'euros pour la partie olympique, prévoit 200 millions supplémentaires après les Jeux pour le transformer en logements étudiants et sociaux.
Pourtant, l'enthousiasme officiel laisse place à une vague de critiques acerbes en Italie. Les Milanais, fiers de leur réputation de capitale du design, ne digèrent pas l'apparence des bâtiments.
Gris, monotones, alignés en parallélépipèdes sans âme, ils évoquent aux yeux de beaucoup l'architecture soviétique.
« Ce village ressemble à Tchernobyl », s'indigne la journaliste et présentatrice télé Selvaggia Lucarelli.
« Un quartier construit par un architecte misanthrope qui veut que les athlètes rêvent de perdre rapidement pour rentrer chez eux. C'est une abomination. »
Pierfrancesco Maiorino, chef du Parti démocrate en Lombardie, abonde dans le même sens :
« Ce que nous voyons aujourd'hui est bien loin de ce qui nous a été présenté lors des précédentes réunions.
Je ne peux pas croire que cette architecture socialiste soit le résultat final. »
Un post de l'agence d'architecture italienne Rivolta, devenu viral, résume le désarroi collectif :
« Partout dans le monde, les Jeux olympiques sont l’occasion de laisser un héritage architectural prestigieux.
Et puis il y a Milan, la capitale autoproclamée du design, qui, pour l'occasion, a décidé de construire un village olympique qui semble tout droit sorti d’un manuel de logements sociaux soviétiques. »
L'agence poursuit sans ménagement : « Un ensemble de parallélépipèdes sans âme dont le seul mérite est de nous rappeler que la laideur est un choix délibéré, un choix d'appauvrissement humain et de mesquinerie administrative.
Milan, ville où il fait bon vivre, ne se conçoit plus, elle se contente de s'assembler. Des quartiers impersonnels, des fenêtres disposées avec une régularité carcérale , un véritable dortoir d'entreprise de l'ère Brejnev. »

La région se défend
Au-delà de l'esthétique, c'est aussi le modèle économique post-olympique qui fait grincer des dents.
Les chambres étudiantes les moins chères sont annoncées à 420 euros par mois, hors charges, un tarif dans la fourchette haute pour Milan, loin d'être accessible à tous.
Les appartements restants seront vendus comme logements sociaux pour les familles en difficulté, mais leurs prix n'ont pas encore été dévoilés, alimentant le scepticisme.
Le projet a par ailleurs déjà dépassé son budget initial de 40 millions d'euros, une dérive justifiée par les autorités par la hausse du coût des matériaux.
Face à ce tollé, le président de la région Lombardie, Attilio Fontana, garde le cap et défend une vision optimiste :
« Ce sera un formidable héritage des Jeux olympiques et cela profitera à toute la communauté.
Les étudiants, notamment ceux qui bénéficient d’un logement social, en bénéficieront grandement. Je pense que c’est un exemple parfait de la manière d’organiser un événement majeur. »
Reste à savoir si cet « exemple parfait » saura convaincre au-delà des discours.
Après les Jeux, le village olympique de Milan accueillera plus de 1 700 étudiants. Le projet s’inscrit dans une stratégie de réaménagement durable du quartier Scalo Romana, un ancien site ferroviaire réhabilité.
