Vincent, tu va débuter dans quelques semaines ta 16e saison en coupe du monde.  Quels sont les secrets de ta longévité au plus haut niveau ?

« Je suis avant tout un passionné.  je ne suis pas non plus une exception dans le paysage du ski de fond mondial. C’est un sport  où l’on vieilli bien. L’alternance des saisons avec une préparation estivale très varié avec différents moyens et  lieu d’entraînement et une saison forte de compétition où l’on pratique vraiment notre sport permet de ne pas trop saturé mentalement. »

Ce printemps Pierre Mignerey a quitté son poste de directeur des équipes de France et Christophe Deloche le remplace. Cela implique des changements pour toi ? Ou alors tout fonctionne comme avant ?

« Nous sommes dans la continuité avec Christophe qui est dans le staff de l’équipe de France depuis plusieurs saisons. Chacun a sa manière d’exposer ses idées mais il n’y a pas de vrai révolution. Et puis Pierre reste malgré tout présent sur des missions purement nationales et  sera sur toutes les étapes de coupe du monde. Nous serons donc amener à le voir très régulièrement. »

On sait que tu entretiens des relations étroites avec ton entraineur Roberto Gal. Pourrais tu nous en dire plus sur Roberto ? On le connait pas bien et pourtant il contribue énormément à la réussite de l’équipe .

« C’est une histoire qui a commencé il y a 12ans. Depuis qu’il est arrivé en France, il s'investit à 100% pour les athlètes, il fait confiance à chacun d’entre nous. Il vit à travers nos résultats et ne souhaite pas forcément être mis en avant. Il est parfois difficile de le faire changer d’avis mais c’est sa force quand il s’agit de prendre des décisions ( par ex pour le fartage). C’est surtout un excellent meneur de groupe qui sait créer une bonne ambiance par sa joie de vivre naturelle. »

Revenons à ta préparation estivale , cela s’est bien passé ? Tu as suivi les mêmes plans d’entrainement que l’an dernier ?

« J’ai n’ai pas connu de problème particulier, j’ai changé quelques petits détails mais 98% de mon programme reste le même ».

L’hiver 2010 avait été faste pour le fond français avec des résultats magnifiques tout au long de la saison. Tout juste pouvait on regretter l’absence d’une médaille aux JO . Quel est ton jugement sur ce dernier hiver ?

« Il est dans la lignée de ce que nous connaissons depuis 2004 avec une équipe masculine capable de rivaliser face à la concurrence étrangère. 2010 aura été marqué par l’arrivée de Maurice sur les podiums de coupe du monde. Concernant les JO, c’est sur c’est une déception , nous sommes passées plusieurs fois si prêt de la médaille.  Nous avions fait les bons choix d'entrainements avec notamment  plusieurs impasses en janvier, nos résultats montrent que nous étions bien préparés. Ensuite tout s'est joué sur des détails, à nous de les optimiser pour qu'à l'avenir nous rentrons avec des médailles autours du cou. »

Avec toi, Jean-Marc et Maurice, la France possède trois leaders capables de grimper sur les podiums.  Y a-t-il de la rivalité entre vous ?  Ou alors vous profitez tous les trois d’une saine émulation ?

« Il n'y a pas de rivalité, chacun essaie de progresser au contact de l'autre. Nous sommes tous les 3 très différents avec chacun sa propre manière de vivre aux quotidiens.  Mais nous avons la même envie de réussir en travaillant beaucoup. Nous sommes assez intelligents pour comprendre que nous avons besoin d'une équipe forte autour de nous pour progresser, ce qui nous permet d'échanger régulièrement, mais cela est la même chose avec les autres gars de l'équipe. »

En 2011 il y aura Oslo et notamment le 50km en skating. On se souvient encore de l’édition 2010 sur cette même piste avec Maurice et toi qui ont dynamité la course.  Voilà qui doit te donner envie pour les mondiaux ?

« Le 50km de l'année passée restera l'un de mes plus beaux souvenirs de ma carrière. Faire une vraie échappée de 39km avec un coéquipier et  le  n° 1 mondial en Norvège c'était de la folie , le retour de Piller Cottrer et l'hypoglycémie de Maurice ont mis encore plus de piment à la fin course et je dois dire que j'étais vraiment heureux de monter sur la 3e place du podium dans une ambiance formidable. Maintenant je sais très bien que chaque course est différente même si la piste et  mes adversaires seront les mêmes. Une chose est sure ses mondiaux connaitront une vraie ferveur populaire et tous les skieurs auront à cœur de réussir dans ce temple du ski nordique , moi le premier. »

Mais avant les championnats du monde, il y aura La Clusaz, évidemment réussir chez toi te tient aussi à cœur ?

« Forcément cette étape de coupe du monde a une saveur très particulière pour moi. Je ne remercierais jamais assez les organisateurs et tous les bénévoles de la Clusaz qui travaillent très durs pour que ce week-end soit une réussite. J'espère que je saurais répondre présent ce jour là comme en 2004 ou bien lors de notre 3e place en relais il y a 2 ans pour que la fête soit encore plus belle. A chaque fois nous vivons de formidable instant avec nos supporters. »

Puis ce sera le Tour de Ski, quelles seront tes ambitions ? Le podium semble difficile en raison de la présence des étapes sprints qui ne te conviennent pas ?

« Hormis ma victoire d'étape à Obersdorf en 2007, je n'ai jamais réussi sur le Tour de ski. C 'est vrai que j'ai des lacunes sur les sprints , j'ai toujours manqué d' explosivité et cela n'ira pas en gagnant avec l'âge. Mais en même temps je réussi pas trop mal le final tour qui a également une épreuve de sprint au programme. Je me dis que c'est possible de faire mieux que mes deux 18èmes places au classement général. J'envisage cette année de changer un peu ma préparation au mois de décembre. C'est très compliqué  d'être au top de sa forme  tout au long de l'hiver , comme je démarre souvent très bien avec les bénéfices de nos stage sur glacier en automne, j'ai une petite baisse  de forme fin décembre.  J 'espère que je vais trouver des solutions pour jouer un peu plus devant sur le Tour... »

A plus long terme, tu seras encore là à Sotchi ? Ou tu prends saison après saison ?

« Je n'ai pas fixé de date, je verrais à la fin de chaque saison si j'ai encore la motivation d'aller à l'entrainement et l'envie de repousser mes limites en compétition. Le jour où tout me paraitra trop dur j'arrêterais. »

Photos : copyright Nordic Focus